G.H.C. Bulletin 18 : Juillet-Août 1990 Page 174

ON NE VEUT PAS DE MAUVAIS SUJETS AUX ILES!
B. et Ph. Rossignol

     Il  court  sur le peuplement des îles  deux  légendes
contradictoires  :  soit  il s'agit de repris de  justice,
soit de cadets de famille.  En fait la population des îles
ressemblait fort à celle de la métropole par sa variété.

     On  trouve  sans cesse dans les  correspondances  des
gouverneurs  des protestations contre l'arrivée de tel  ou
tel indésirable,  ce qui montre bien qu'il y en avait mais
qu'il s'agissait de cas individuels et non d'une politique
de peuplement, sauf peut-être lors de la Régence. C'est de
nouveau de la mine de trésors de la série E (E61) que nous
tirons  le  texte  suivant qui est  une  analyse  par  les
bureaux du ministère de la Marine, d'une lettre envoyée de
Fort-Royal  le  5  août  1721  par  M.   le  Chevalier  de
FEUQUIèRES (1) au Conseil de Marine.

     "Le sieur de LAROCHEGUYON (2) l'a prié de la part des
officiers  subalternes  de chasser le sieur  CAMUSAT  (3),
enseigne,  parce  qu'il les déshonore par ses friponneries
et par ses bassesses.  Si quelque capitaine marchand  vou-
lait  le  passer en France avec son frère encore plus  mé-
chant que lui,  il les renverrait,  et il eût dû le  faire
dès le temps qu'il arriva par "le Dromadaire",  sur ce que
le  Sr  de ST-JAMES (4) et d'autres lui apprirent  de  ses
mauvaises  qualités.  C'est un grand malheur pour les îles
qu'on  y  envoie tous les jours  de  mauvais  sujets.  Les
prisonniers  qui étaient destinés à la Louisiane sont tous
mendiants ou voleurs. Les uns qui sont sexagénaires, aveu-
gles  ou estropiés ne peuvent faire autrement que de  men-
dier;  les autres qu'on a placés chez les habitants  trou-
vent  mieux  leur compte à quitter leurs maîtres et à  les
voler.  Ces gens là pourraient causer du désordre dans  la
colonie  s'ils  s'attroupaient  avec les  nègres  marrons.
Plusieurs de ceux qu'il avait mis dans les compagnies  ont
déserté  et  repassé en France sur de fausses  permissions
signées  de  lui et de M.  BéNARD (5)  qu'un  d'eux  avait
fabriquées.
     Le Conseil pourrait remédier au mal en lui permettant
de renvoyer en France ceux qui sont à charge à la colonie,
et  en  exemptant les vaissaux marchands d'apporter  à  la
Martinique autant d'engagés qu'ils auraient passé en Fran-
ce de ces prisonniers ou autres gens sans aveu."

     Il est porté en marge :

Nota  :  Il a été recommandé par M.  de VIENNE son parent;
son frère n'est pas officier.

Il  paraît qu'il faut casser cet officier et  lui  marquer
sur  le reste qu'on a attention de n'envoyer pour  engagés
que  des  gens en état de travailler,  mais que  comme  la
plupart sont envoyés malgré eux,  il faut s'attendre qu'il
y  aura souvent des fripons et que l'attention qu'il  doit
avoir  est  de  les châtier sévèrement quand ils  sont  en
faute.  On ne peut lui donner la permission qu'il  demande
de les renvoyer.

Porter à M. le Régent

Décision de S.A R. : approuver

Fait et arrêté le 12 octobre 1721. L.A. de BOURBON
     Le passage que nous avons marqué en gras et qui vient
du Conseil de Marine semble indiquer qu'à cette période de
la Régence, comme on l'a dit parfois et nié d'autres fois,
on envoyait aux îles les gens malgré eux, ce qui n'est pas
le  cas aux autres périodes.  Aux gouverneurs locaux de se
débrouiller  avec ces fripons.  C'est ce que va tenter  de
faire FEUQUIèRES.

     La  Correspondance au départ de la  Martinique  (C/8)
nous indique que le sieur CAMUSAT avait été nommé enseigne
aux îles avec quelques autres le 23 avril 1720,  par déci-
sion du Régent.
     Le 14 octobre 1721, FEUQUIèRES annonce qu'il l'envoie
à  Saint-Domingue  mais il n'a pas dû le faire  finalement
car  le 25 février 1722 il le révoque et le 21 juillet  de
la même année il "prend des sanctions contre  lui".  C'est
la dernière trace que nous ayons trouvée de CAMUSAT.

Notes
(1) François de PAS de MAZENCOURT,  marquis de FEUQUIèRES,
gouverneur de la Grenade en 1711, de la Guadeloupe en 1717
et  alors  gouverneur général des Iles du Vent (de 1717  à
1728)
(2) Pierre François GUYON de LA ROCHE GUYON,  né en  1703,
enseigne  à la Martinique,  fils de Pierre,  lieutenant de
Roi alors à la Grenade,  plus tard en Guadeloupe et  enfin
en Martinique.
(3) ou CAMUZAT. D'après le "Répertoire des généalogies" du
colonel E. Arnaud, il existe des CAMUSAT en Auvergne et en
Champagne.
(4) Jean-Charles  PERCHERON de SAINT-JAMES,  lieutenant de
vaisseau depuis 1703.
(5) Charles BESNARD,  intendant des Iles du Vent de 1719 à
1722.

BOURGOGNE, ST-DOMINGUE, CUBA : LES CHAPPOTIN

     C'est à l'obligeance de M. John Jova que nous devons
la généalogie de cette famille, publiée dans "Historia de
familias cubanas" (GHC  p.27).

     C'est  une famille dont l'histoire est connue  depuis
Jean,  anobli  par  François  I  pour  services  rendus  à
Marignan. Elle a été présentée dans Chaix d'Est-Ange 15 et
par  le colonel Arnaud dans "la France généalogique"  1982
p.  33-4  et 42-6 (que nous n'avons  pas  consulté).  Elle
serait  originaire  de  Lorraine,  passée  à  Irancy  près
d'Auxerre puis St-Domingue. Nous présentons ici une généa-
logie simplifiée à partir de St-Domingue, puis détaillée à
Cuba (mais sans les parents des époux des filles).

I Jean Baptiste de CHAPPOTIN, capitaine de cavalerie, fils
  de Jean, gouverneur d'Irancy, et Marie ROUSSEAU
  x St-Domingue Marie BOUCHET, fille de François et Marie
    SEVIAN

II Denis CHAPPOTIN
  o St Domingue, + St Domingue 1780
  x Nantes (St Vincent) 16 9 1749 Louise SANTO DOMINGO de
    GUZMAN, fille de Louis et Marie GERVIER

III
1 Marie Josephe CHAPPOTIN x Marquis de BESNé
2 Marie Thérèse CHAPPOTIN x Alexandre de VINCENT de
  MAZADé, gouverneur de St-Domingue de 1787 à 1789



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Révision 26/08/2003