G.H.C. Bulletin 20 : Octobre 1990 Page 210

JEAN JOSEPH ANDRE ABEILLE, NEGOCIANT DE PORT-AU-PRINCE
Georges Ladevie

     Mon  quadrisaïeul,  Jean ABEILLE,  a eu l'occasion  à
deux  reprises  de  participer d'une manière active  à  la
Révolution, bien que profondément royaliste.

1756 :  Il naît le 23 août à La Ciotat (Bouches du Rhône),
dans une famille de négociants armateurs.  Son père, Jean-
Louis,  a servi comme officier de marine;  il était  capi-
taine de navire marchand.
  Sa  mère,  Madeleine FARGIER,  était fille de  François,
chirurgien-major des galères du Roi,  membre de l'Académie
Royale  de Chirurgie.  Il avait terminé sa carrière  comme
chirurgien-major  de l'hôpital de l'Ordre de Malte,  à  La
Valette. J'y ai retrouvé son testament.
  Par  sa  mère Marie Claude BOISSEAU,  Madeleine  FARGIER
était parisienne,  avec de nombreux ancêtres ayant  occupé
des fonctions administratives communales :  échevin, juge,
consul.

1771  :  Jean ABEILLE,  à la fin de ses études,  faites au
collège  de La Ciotat où son oncle Antoine  ABEILLE  avait
été  supérieur,  est envoyé par son père rejoindre à Saint
Domingue un lointain cousin ABEILLE, négociant.
  Saint Domingue était alors "l'Eldorado" où les  français
se rendaient pour faire fortune.

1772 : Jean ABEILLE est officier dans la Milice; il y fait
la  connaissance  de la famille  de  son  capitaine,  J.F.
BéRARD "du PITHON",  dont il devait épouser une des filles
plus tard à Paris.

1779 : Il a déjà une belle situation et, après un voyage à
Marseille  pour demander à son père de lui servir de  cor-
respondant,  il  fonde à Port-au-Prince une Maison de com-
merce qui devient rapidement très florissante, à tel point
qu'il  est  un des négociants les plus  importants  de  la
ville.  Un  mémoire,  certifié par l'Intendant de Port-au-
Prince,  montre qu'il a payé pour un million de livres  de
droits portuaires sur ses marchandises arrivées à Marseil-
le de 1779 à 1783.

  C'était un travailleur infatigable, qui écrivait dans sa
baignoire  creusée  dans un tronc  d'acajou  et  conservée
longtemps dans la propriété familiale en Provence.

1788 :  Il revient pour la quatrième fois en France.  Il a
alors  32 ans et sa fortune est  déjà  considérable;  deux
immeubles en plein centre de Marseille en font partie.

1789  :  Il  est nommé Administrateur de l'Hôpital  de  la
Charité  de Marseille et Député extraordinaire de la Cham-
bre de Commerce de Marseille auprès de l'Assemblée  Natio-
nale. Un très bon portrait de lui figure au Musée de cette
Chambre de Commerce.
  Le  9  octobre 1789,  Assemblée  Nationale,  extrait  du
procès-verbal (1) :

"Les députés extraordinaires des grandes villes de commer-
ce  ont demandé à être admis à la barre et ont dit que  le
commerce  et l'industrie sont complétement arrêtés  depuis
la Révolution,  que le chômage sévit (...),  qu'ils deman-
dent  à  être  un peu soutenus et  aidés  par  l'Assemblée
(...),  qu'ils soient tenus au courant de ce qui se  passe
dans le pays lorsque cela peut les concerner (...), qu'ils
aient  une  place dans une tribune.  Signé :  ROSTAGNY  et
ABEILLE pour Marseille, GOSSELIN pour Lille et Dunkerque."
  Le président leur donne satisfaction.
  Jean ABEILLE devait intervenir à d'autres reprises.

1790 : Il rédige deux documents en faveur des colonies (2)
1° "Aperçu rapide sur les colonies"
2° "Essai  sur  nos colonies et sur le  rétablissement  de
Saint Domingue"

1790  :  Son  contrat de mariage le 15 septembre  à  Paris
donne un état précis de sa fortune,  soit : 533.000 livres
en  immeubles à Marseille,  propriétés à Saint Domingue et
fonds dans ses maisons de commerce.
  La  future,  Victoire BéRARD du PITHON,  fille de  Jean-
François  et Marguerite Victoire MAGNAN,  apporte  120.000
livres de principal. (3)
  Ils se marient à Saint Nicolas des Champs le 18  septem-
bre.
  Jean ABEILLE habite alors en partie à Paris et chez  ses
beaux-parents,  au château de Draveil (devenu par la suite
"Paris Jardin"), en partie à Marseille.

1793  :  Année dont les événements vont être cruciaux pour
lui et qui feront l'objet en 1814 d'un écrit sous le titre
"Notes  et pièces officielles relatives aux événements  de
Marseille et de Toulon en 1793 par Mr Jean  ABEILLE,  l'un
des  députés de Marseille à cette époque,  auprès des ami-
raux alliés croisant sur les côtes de Provence." (2)

Résumé des événements :
  Jean  ABEILLE  est  Président  de la  Section  de  Saint
Ferréol  à Marseille,  nom de l'église où elle se  rassem-
blait.  Cette  Section réunissait un très grand nombre  de
propriétaires et de négociants. Par la suite, cette église
fut  détruite par les  révolutionnaires,  en  représailles
contre ses activités factieuses !
  Le  14 août,  un assemblée représentant toutes les auto-
rités  du  département des  Bouches-du-Rhône,  nomme  Jean
ABEILLE,  avec  quatre autres personnes,  pour  former  un
Comité  chargé  des pleins pouvoirs auprès de  l'Assemblée
Constituante.
  Ce  Comité essaie de rallier Toulon et d'offrir un appui
aux escadres et aux troupes anglo-espagnoles.
  Le 20 août (4) Jean ABEILLE est envoyé en députation par
le Comité vers l'escadre anglaise.
  Le 21 août,  il est à bord du vaisseau amiral "Victory",
qui  croise au large du Cap Sicié,  commandé par  l'Amiral
HOOD.  Il  négocie un échange de 59  prisonniers  français
contre  des prisonniers anglais,  hollandais et  espagnols
qui pourraient se trouver aux mains des Français.
  Le  22  août au matin,  la frégate  anglaise  "Némésis",
capitaine WODLEY, se présente devant Marseille avec les 59
prisonniers.
  Le 28 août,  il est resté à bord du vaisseau, tant comme
otage  que pour discuter avec l'Amiral HOOD  des  possibi-
lités  de  faire  venir,  de Gênes (Italie)  à  Marseille,
quelques  navires de blé pour ravitailler cette  ville  au
bord  de  la famine.  Il obtient satisfaction et  fait  un
rapport.
  Très  certainement,  il  en profite pour  examiner  avec
l'Amiral  les possibilités d'une collaboration  contre  le
régime révolutionnaire.
  Une copie de son rapport est faite et signée des membres


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