G.H.C. Numéro 32 : Novembre 1991 Page 430

LABOUREURS, ENGAGEZ-VOUS !
Pierre Bardin

  
     Si l'émancipation du 4 mars 1848,  déclarant que  "la 
terre de France ne peut plus porter d'esclaves",  eut pour 
conséquence  immédiate  de rendre leur dignité à ceux  qui 
n'étaient que "biens meubles", elle produisit dans le même 
temps un rejet total,  de la part des "nouveaux citoyens", 
de tout travail agricole. Fâcheux, certes, mais compréhen- 
sible. Il fallut donc faire appel à des engagements volon- 
taires,  aux Indes, en Afrique et, dans une faible mesure, 
en Chine.  Ceci jusque vers 1885. Cependant, dès 1849, des 
tentatives  de  recrutement furent effectuées  en  France, 
comme  le  prouve  le  document  ci-après,   reproduit  in 
extenso,  que  l'on  trouve à la  Bibliothèque  nationale. 
Eurent-elles du succès,  je l'ignore. On lira avec intérêt 
que  "le  travail  de la canne est moins  pénible  que  le 
battage  du grain".  Je doute que le recruteur ait eu  une 
grande connaissance du labeur agricole,  ou alors il avait 
dans   la   tête  les  images  de  "la  douce  sueur   des 
travailleurs  joyeux  coupant le roseau sucré"  chères  au 
mythe du "bon sauvage" de Tonton Jean-Jacques.

    1849 : conditions d'engagement pour des laboureurs
      voulant aller à la Guadeloupe pour travailler
                 à la culture de la canne
                      B.N. LK/12/90

Arrangements divers :
- Le passage sera gratuit,  les frais de route de l'engagé 
jusqu'au port d'embarquement lui seront  remboursés;  dans 
le cas où le gouvernement paierait les frais de route,  la 
somme allouée serait 50 francs.
- Les travaux dans la colonie sont moins pénibles que ceux 
de France tels que la fenaison,  le battage des grains, la 
culture de la vigne, etc.
- Les  engagés feront tout ce qui concerne la culture  des 
cannes et leur coupe,  savoir :  labourer, planter, fumer, 
clavicer  et passer au moulin;  ce dernier travail se fait 
généralement par les femmes et les enfants.
- Les engagés seront nourris sur l'habitation; on fournira 
un logement pour chaque famille;  la nourriture se  compo- 
sera de pain,  légumes secs,  légumes du pays,  lard salé, 
morue  sèche et une bouteille bordelaise de vin rouge pour 
les  hommes  seulement.  Un jardin sera accordé  à  chaque 
famille;  elle pourra y cultiver,  mais toutefois sans que 
cela  nuise au travail de l'habitation,  de quoi élever  à 
son profit quelques volailles ou des cochons.
- Le prix de l'engagement,  par an, est de 300 francs pour 
les  hommes et de 175 à 200 pour les femmes  suivant  leur 
force;  les  enfants en état de garder les bestiaux auront 
75  francs par an;  ceux plus grands seront payés  suivant 
leur âge et leur force : ils pourront avoir jusqu'à 250 ou 
300 francs,  si leur travail peut être comparé à celui des 
hommes valides.      
- La dépense pour les vêtements est peu de chose :  on  ne 
porte  que des vêtements de toile ou de coton;  cependant, 
on  peut porter du drap,  mais ce n'est pas une  nécessité 
absolue. 
- L'habitation est située à une lieue et demi de la  ville 
de  la  Pointe-à-Pitre et à une demi-lieue  du  bourg,  où 
chacun  pourra se rendre le dimanche et les jours de  fête 
pour remplir ses devoirs religieux.
- L'engagement  doit être de 4 ou 5 ans.  Si,  pendant  ce 
temps,  des  circonstances imprévues venaient à amener une 
rupture,  l'engagé aurait à rembourser au propriétaire une 
indemnité  en raison du temps non écoulé,  pour le  dédom- 
mager des frais de passage et de conduite. 
     On désirerait quelques familles formant un  personnel 
d'une    trentaine   d'individus,    parmi   lesquels   se 
trouveraient,  autant  que  possible,  peu  d'enfants  au-
dessous de huit ans.

S'adresser à M.  VINCE,  négociant,  rue Voltaire n° 17, à 
Nantes. 
                           ***

     Il  serait intéressant de connaître le nom de l'habi- 
tation. En regardant une carte et en reportant la distance 
"d'une lieue et demi de Pointe-à-Pitre",  c'est-à-dire 6 à 
7 km,  pour trouver une habitation importante ayant besoin 
de 30 personnes,  on est tenté de chercher vers Abymes. Y-
eut-il des départs,  et combien ?  Certains des  "engagés" 
firent-ils souche en Guadeloupe ? Autant de questions dont 
les réponses se trouvent peut-être dans les papiers (s'ils 
existent) de M. VINCE, à Nantes. 

NOUS AVONS RECU

    ULTRAMARINES n° 3, juillet 1991 (AMAROM et IHPOM)
               (voir GHC p. 151, 195, 314)

Article  sur Bangui et la France libre en  1940.  Diverses 
informations. Rien sur les Antilles.

de Jean-Denis Bergasse
- Un feuillet d'informations sur la "Société archéologique 
scientifique  et littéraire de Béziers"  (président,  J.D. 
Bergasse) que nous tenons à la disposition des lecteurs. 

de Claude Naine-Lafages
Communication du livre :
   Contribution de la Guadeloupe à la pensée française
                       Adolphe Lara
(discours de Gratien Candace et préface de Léon Hennique)
             Editions Jean Crès, Paris, 1936

Courtes  biographies  et  extraits  d'oeuvres  de  Jacques 
COQUILLE  DUGOMMIER (1738-1794),  Germain  LéONARD  (1744-
1793), Charles Auguste SORIN (1766-1833), Vincent CAMPENON 
(1792-1843),  Saint-Aurèle  POIRIé (1795-1855),  Julien de 
MALLIAN  (1805-1851),  Auguste LACOUR  (1805-1869),  PINEL 
DUMANOIR (1806-1865),  Anténor VALLéE (1809-1870),  Armand 
BARBèS   (1809-1870),   Joseph   SAINT-RéMY   (1815-1856), 
Aristide  de  GONDRECOURT  (1876-1815),  Alexandre  PRIVAT 
d'ANGLEMONT  (1815-1859),   Henry  d'ESCAMPS  (1815-1891), 
Pierre  MAUREL-DUPEYRé  (1818-1893),   J.B.   Rosemond  de 
BEAUVALLON  (1819-1903),   MELVIL-BLONCOURT   (1823-1880), 
Jules BALLET (1825-1904), Adolphe BELOT (1829-1890), Emile 
VAUCHELET   (1830-1913),   Auguste  AGRICOLE  (1835-1901), 
Germain CASSE (1837-1900),  Auguste LE DENTU  (1841-1926), 
Henri de LACROIX (1844-1924), Alexandre ISAAC (1845-1899), 
Dominique  GUESDE (1850-1905),  Léon HENNIQUE (1850-1935), 
Charles-Louis-Marie  LANREZAC (1852-1925),  Auguste  ISAAC 
(1853-1913), Gaston SARLAT (1853-), Gaston GERVILLE-RéACHE 
(1854-1908),   MERMEIX   (Gabriel  TERRAIL)   (1859-1930), 
Camille MORTENOL (1859-1930), Hégésippe LéGITIMUS (1868-), 
Gratien  CANDACE  (1873-),   Alexis  LéGER  (1887-),   Léo 
GERVILLE-RéACHE, Gilbert de CHAMBERTRAND (1890-).




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Révision 26/08/2003