G.H.C. Numéro 34 : Janvier 1992 Page 488

REFLEXIONS SUR LA TOPONYMIE DE LA GUADELOUPE (fin)

puissante.  Nous pouvons citer Saint-Claude, créée sur une 
portion de Basse-terre extra-muros, qui conserva ce nom un 
temps  avant de prendre le nom de la rivière qui avait été 
baptisée  par les Jésuites qui possédaient une  habitation 
le long de celle-ci.  Ou Sainte-Rose,  laquelle,  en 1759, 
était encore la paroisse du Grand Cul de Sac; le nom de la 
patronne de l'église ne s'imposa que plus tard.  Ou Saint-
Louis de Marie-Galante,  l'ancienne Grande-Anse. Ou encore 
Sainte-Anne,  Saint-François,  communes fortement marquées 
par le sucre et qui ne prirent une réelle importance qu'au 
XVIII° siècle, avec la vulgarisation des moulins à vent.

     Avec   le  sucre  se  créa  une  nouvelle   "noblesse 
terrienne"  constituée  par les  familles  des  habitants- 
sucriers.  Souvent  d'origine modeste,  ils choisirent (ou 
peut-être  cela se fit-il naturellement ?) de  marquer  de 
leur  impact le lieu qui vit les débuts de leur  ascension 
sociale. Il ne faut pas oublier que, sous l'Ancien Régime, 
la  possession  de la terre était le signe tangible de  la 
noblesse et elle donnait son nom à celui qui la possédait. 
En Guadeloupe,  la démarche fut inverse : c'est la famille 
qui  donna le nom à la terre.  Nous en avons de  multiples 
exemples,  comme DUQUERRUY à Petit-Bourg,  BOUVIER, BOVIS, 
VALEAU,  etc.  à Baillif. Mais c'est surtout à l'intérieur 
de la Grande-Terre et à Marie-Galante que ce phénomène est 
massivement  perceptible,  y  compris pour  les  quartiers 
connus  des faubourgs de Pointe-à-Pitre,  comme  BOISSARD, 
BESSON,  BAIMBRIDGE,  ou, plus loin, DOUVILLE, BOISVIN, ou 
même  Baie-MAHAULT,  d'une famille qui fut  présente  dans 
toutes les Antilles au XVIII° siècle.

     Ainsi,  le  choix d'un nom de lieu,  de paroisse,  de 
quartier n'est pas innocent et si,  dans un premier temps, 
celui-ci s'effectua sans arrière-pensées politiques et  en 
toute  bonne  conscience (les  Caraïbes,  les  "sauvages", 
étaient tenus pour quantité négligeable),  nous ne pouvons 
pas en dire autant des autres périodes.
     Christophe  COLOMB,  le premier,  prit possession des 
terres découvertes en les baptisant. Cela se fit au nom de 
l'Espagne  et sur des critères en relation avec  la  poli- 
tique espagnole.
     L'Eglise  voulut montrer ensuite la  christianisation 
effective du territoire; les habitants-sucriers, la fierté 
de  leur  réussite et marquer la propriété physique de  la 
terre.
     L'attitude  de Victor HUGUES à partir de 1794 mit  en 
valeur l'aspect éminemment politique de la relation  entre 
la  toponymie  et les valeurs sociales que  les  autorités 
veulent promouvoir,  inconsciemment,  ou consciemment dans 
le cas de la Révolution.   
  En débaptisant toutes les communes commençant par  Saint 
ou  Sainte,  il marqua d'abord l'aspect profondément anti- 
clérical du nouveau régime.  C'était avant tout une action 
pédagogique,  car  il voulait faire passer un message  qui 
devait imprégner les citoyens des nouvelles valeurs. 
  Pointe-à-Pitre devint Port-de-la-Liberté,  puisque c'est 
là  que commença la reconquête de l'île et que les anciens 
esclaves purent prendre conscience de leur nouveau statut. 
Sainte-Rose devint Tricolore, comme le drapeau de la Répu- 
blique.  Port-Louis,  qui  rappelait les rois  de  France, 
devint Port-Libre, Saint-François, Egalité et Sainte-Anne, 
Fraternité.   
  Grand-Bourg de Marie-Galante,  île qui fit sécession  et 
choisit la première la Révolution,  devint Réunion,  alors 
que  Saint-Louis reprenait le nom plus neutre de l'une  de 
ses sections,  Vieux-Fort, en souvenir du premier établis- 
sement.
     Mais,  très  vite,  ces communes reprirent leurs noms 
primitifs, marquant ainsi la fin d'une période qui fut une 
parenthèse  dans l'évolution économique et sociale  de  la 
Guadeloupe.  Comme fut restauré l'esclavage, fut restaurée 
la toponymie.

     Et  nous terminerons par l'une des dernières communes 
créées,  Gourbeyre,  qui le fut le 3 mars 1884, et dont le 
nom remplaça celui de Montagne Saint-Charles (en l'honneur 
du gouverneur Charles HOUëL) ou Dos d'Ane,  les deux  noms 
par  lesquels  on  désignait cette partie  de  Basse-Terre 
extra-muros.  On choisit le nom du gouverneur de la Guade- 
loupe qui s'était illustré lors du terrible tremblement de 
terre  de  1843  où il organisa les secours  à  la  grande 
satisfaction de tous.
     Marque  du temps,  l'habitude de baptiser des  lieux, 
des  rivières,  des  villes,  du nom d'un général ou  d'un 
gouverneur est très caractéristique de la vague  coloniale 
du   XIX°  siècle  et  fut  particulièrement  utilisée  en 
Afrique.

     Ainsi,  à travers les exemples choisis, nous avons pu 
distinguer  les  différentes strates de l'histoire  de  la 
Guadeloupe.  A  chaque  période correspond un ensemble  de 
noms  qui  sont  le reflet des liens  qui  rattachent  les 
groupes  humains qui ont fait l'histoire au milieu  qu'ils 
ont construit.

TROUVAILLES

de Claude Meissner : pour B. Faucher de Corn

Maison  d'Education  de la Légion  d'Honneur  (Martinique-
Paris, XIX°) :
Jeanne Marie de CORN,  entrée le 9 10 1817; élève gratuite 
9 7 1818; sortie 24 5 1822.
Marie E. Isménie de CORN, entrée le 9 7 1818; sortie le 24 
5 1822. 

de Jacques de Peyrelongue :

A  Peyrehorade (Landes),  18 2 1787,  mort subite de  dlle 
Marie Anne LANDAIS,  épouse de M. DESAA, née à St-Domingue 
(Ste-Rose  de  la  Grande Rivière,  quartier  du  Cap)  et 
habitant Bayonne, environ 47 ans.

de Nicole Dreneau : aux Archives municipales de Versailles 

Divorce, 16 pluviôse an VII (4 2 1799), acte 17 :
- Alexandre  Jacques SIMONNET MAISON NEUVE,  homme de  loi 
demeurant  à Versailles avenue de Paris n° 23,  fils de  + 
Jean Baptiste et + Marie Anne PEIGNé
- Marie CROISEUIL,  demeurant à Versailles avenue de Paris 
n° 12,  née à St Joseph du Fort Dauphin,  île St-Domingue, 
55 ans, fille de + Barthélemy et + Elisabeth GASCHET
Le  mariage avait été célébré à Paris (St-Etienne-du-Mont) 
le 19 avril 1784 (pas d'enfant).




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