G.H.C. Numéro 42 : Octobre 1992 Page 656

LES PEUX ET LEURS ALLIANCES
Sylvain Poujol

     Les  PEUX  (*)  étaient bouchers de père  en  fils  à 
Lusignan,  gros bourg du Poitou.  Ce patronyme provient de 
Puy,  une  hauteur en occitan,  tout comme Puech,  Poujon, 
Dupouy, etc.

     Jean PEUX et Louise RAGEAU eurent au moins 5  enfants 
qui se succédèrent tous les ans ou presque :  Madeleine en 
1773  (décédée  la  même année),  Jean-François  en  1774, 
François en 1775; puis vint Jean dont voici le baptême :

"Le vingt cinq septembre mil sept cent soixante et seize a 
été baptisé Jean, né du jour précédent, fils de Jean PEUX, 
boucher,  et de Louise RAGEAUD, son épouse légitime. A été 
parrain  Louis DANIAU et marraine  Théodor  MOCQUER.  J.P. 
LATTIER, curé de Franzay de Lusignan"

Il fut suivi de Pierre Barthélémy, né en 1778 :

"Le  ving  cinq août mil sept cent soixante et dix huit  a 
été baptisé Pierre BARTHELLEMI, né du jour précédent, fils 
de François PEUX,  marchand boucher, et de Marie RAGEAU; a 
été  parrain  Pierre  PEUX,  boucher,  et  marraine  Marie 
RASSINOUX";  ainsi signé au registre :  J.P. Lattier, curé 
de Franzay de Lusignan

     Remarquons  que ce dernier est dit fils  de  François 
PEUX,  marchand boucher et de Marie RAGEAU, alors que Jean 
et les enfants précédents étaient portés fils de Jean PEUX 
et  de  Louise RAGEAU.  Il ne s'agit pas de  deux  couples 
différents,  car dans tous les actes établis en Martinique 
Pierre  Barthélémy  s'est  dit fils de Jean et  de  Louise 
RAGEAU   (ce  dernier  patronyme  avec  des   orthographes 
différentes).  Il s'agit donc d'une erreur commise par  le 
curé  de Lusignan sur les prénoms ou bien les père et mère 
avaient  des  doubles prénoms :  Jean  François  et  Marie 
Louise, le curé ayant pris tantôt l'un, tantôt l'autre.

    Jean et Pierre partirent aux Isles du Vent d'Amérique. 
Quand et comment ?  Nous l'ignorons. Le premier témoignage 
de  leur présence en Martinique est l'acte de décès à Fort 
de France,  en 1803,  de "Jean PEUX,  25 ans,  dit  Louis, 
natif de Lusignan,  boucher de cette ville". (Notons qu'il 
avait 27 et non 25 ans).
Pour  ce  qui est de Pierre Barthélémy,  le  premier  acte 
officiel  qui  le concerne est de 1807,  mais il était  en 
Martinique dès juillet 1802, date de procréation d'un fils 
dont la naissance a été déclarée bien tardivement (plus de 
4 ans après !).

     C'est le 18 novembre 1807 que "Pierre PEUX,  boucher, 
32  ans environ (en réalité 29 ans),  fils de Jean  et  de 
Louise  RAJOT de Lusignan",  se marie avec Marie  Adélaïde 
LANTON,  26 ans. Les époux ont alors légitimé deux garçons 
anonymes,  l'un né le 27 avril 1803 auquel sont donnés les 
prénoms de Charles Numa;  l'autre, né le 17 juin 1806, est 
appelé   Pierre  Félix.   Curieusement,   leurs  actes  de 
naissance sont portés seulement le 29 décembre 1807.

(*)  à distinguer des descendants de Pierre  PEU,  dit  la 
Roche,  implantés  en  Martinique dès le 17ème  siècle  et 
appelés PEU du VALLON au 18ème.

                        LES LANTON

     L'acte   de  mariage  de  Pierre  PEUX  nous  indique 
qu'Adélaïde LANTON, 26 ans, née à Fort-Royal le 26 janvier 
1781,  est la fille de feu Abdou LANTON, chirurgien major, 
et   de  Marguerite  Catherine  LAPIERRE;   la  fille   du 
chirurgien  n'a pas su signer,  alors que le  boucher  l'a 
fait ! Le père d'Adélaïde, prénommé tantôt Antoine, tantôt 
Abdon (et non Abdou - à la lecture,  les "u" et les "n" se 
confondent), était né à Bordeaux, paroisse de Saint-Mexent 
(et non Saint-Maxan, comme c'est écrit sur les registres). 
Il était le fils de Nicolas LANTON, tourneur en argenterie 
et  de Marie DESHORMEAU.  Voici son acte de baptême du  16 
octobre 1748 :

 "A été baptisé dudit jour, Adon, fils légitime de Nicolas 
LANTON,  tourneur en argenterie,  et de Jeanne DESHORMEAU, 
paroisse de St-Mexen.  Parrain Odet Rodes,  marraine Marie 
DESORMEAU. Naquit hyer au soir à huit heures."

     Ce prénom d'Adon,  fréquent à Rochefort, proviendrait 
du mot germanique Adal,  noble, comme Ade et Ado. Il était 
le  dernier d'une famille de 11 enfants (que nous  dirions 
nombreuse  actuellement,   mais  qui  était  habituelle  à 
l'époque). Sa mère avait enfanté pratiquement chaque année 
et elle mourut jeune (à 36 ans,  3 ans après la  naissance 
d'Adon).

     Nicolas  LANTON et Marie DESHORMEAU s'étaient  mariés 
en  la paroisse Saint-Projet de Bordeaux en 1736.  Nicolas 
était fils de feu Pierre, maître cordonnier et Marie était 
la fille de feu Jean DESHORMEAU.

Le  patronyme  LANTON provient de  "l'Antoine";  celui  de 
DESHORMEAUX est un nom de lieu : au voisinage d'ormeaux.

     Adon LANTON s'était marié le 1er avril 1773 au Mouil- 
lage de Saint-Pierre,  avec Marguerite Catherine LAPIERRE, 
native du Marin, fille de Louis LAPIERRE, ancien capitaine 
de  cavalerie  du quartier du  Vauclin,  et  de  Catherine 
MAHAULT,  décédée  en 1775.  L'acte précise qu'Adon  était 
chirurgien major au Fort Bourbon.  Par la suite, il exerça 
son art à Saint-Pierre.
Le  couple  LANTON/LAPIERRE  eut au moins trois  filles  : 
Marie Josèphe,  née dès octobre 1773,  avait comme parrain 
son grand-père,  Nicolas LANTON, qualifié de négociant. Ce 
dernier rentrera à Bordeaux et à son décès,  à 73 ans,  il 
était  sacristain de la paroisse,  comme l'avait  été  son 
père.  Le second enfant,  né aussi à Saint-Pierre, fut une 
fille,  Rose Elisabeth, qui épousera Etienne BARRY (Généa- 
logie et Histoire de la Caraïbe,  1991, p. 296). Le couple 
s'installe au Fort-Royal où naquit Marie Adélaïde,  future 
épouse de Pierre PEUX.

     Revenons  au  mariage  de  Pierre  PEUX  :   quelques 
semaines auparavant, un contrat est préparé par Me. Blain, 
notaire à Fort-de-France,  et signé en la maison du futur, 
rue Sainte Elisabeth.  Il prévoit une communauté des biens 
des futurs,  chacun apportant au départ 3.000  livre.  Les 
biens  propres  de  Pierre  sont  constitués  de  meubles, 
d'argent,  d'argenterie,  d'esclaves et de dettes actives, 




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