G.H.C. Numéro 55 : Décembre 1993 Page 917

Un autre fils VERGENNES épouse une autre créole

de BOUSSAC DUONT.  Il fut marié trois fois.  Tout  d'abord 
avec  dame  Marie  Louise CANOT (?)  puis  avec  Catherine 
JUCHEREAU  de SAINT-DENIS,  d'où la jeune fille qui épousa 
le fils aîné du ministre de Louis XVI (Catherine JUCHEREAU 
de SAINT-DENIS décédera à Tours,  paroisse St-Pierre, le 5 
février 1768),  enfin dernier mariage le 30 juin  1773,  à 
Notre-Dame  de  l'Assomption des Cayes,  avec dame  Claude 
Catherine DUFOURCQ, née sur la paroisse du Fond des Nègres 
le 4 mars 1734, fille de Jean, conseiller du roi, natif de 
La Réole,  et Marie Anne ABRAHAM, native de la paroisse de 
l'Accul (St-Domingue). 
  De ce dernier hymen naîtra,  le 9 octobre 1774, paroisse 
Saint-Michel  du Fond des Nègres,  Denis Louis Joseph  qui 
épousera  à Paris,  le 30 nivôse an XI,  Claire  Charlotte 
Louise   (et  non  Claire  Caroline  Louise)  GRAVIER   de 
VERGENNES, née à Versailles le 1er décembre 1784, fille de 
Louis  Charles  Joseph GRAVIER de VERGENNES et  de  Claire 
Gabrielle  de  LA  PALUN (contrat  de  mariage  devant  Me 
Rouen).  Denis  Louis Joseph de LENTILHAC décédera à Paris 
en floréal an XII.

     Les  biens de la mariée,  dans le contrat de  mariage 
qui nous intéresse aujourd'hui, se composaient de :
- une  habitation  à sucre au quartier de la  Petite-Anse, 
dépendance du Cap,
- les 2/3 d'une habitation dite des Fonds Blancs,
- une somme de 300.000 livres,  argent de  Saint-Domingue, 
dues  par Louis Barbe de JUCHEREAU marquis de SAINT-DENIS, 
oncle maternel.

     Constantin de VERGENNES avait vu le jour à Constanti- 
nople,  le  1er  novembre 1761.  Quant à  mademoiselle  de 
LENTILHAC  de  SÉDIèRE,  elle était née le 22 avril  1762, 
baptisée le 2 septembre suivant, paroisse St-Jean-Baptiste 
du Trou, juridiction du Fort-Dauphin.

     Sauf  erreur de ma part,  il n'y eut que deux  filles 
nées de cette union :
- Anne  Caroline  Constance,   décédée  à  Hambourg  (Ste-
Gertrude), âgée de 13 ans, le 5 septembre 1795,
- Anne  Marie  Philippine  Claudine,  décédée  à  Hambourg 
Altona, âgée de 12 ans et 9 mois, le 2 mai 1796
(actes enregistrés à Tours le 13 fructidor an X).
     La  mère  était morte à Paris  (St-Sulpice),  le  1er 
novembre  1788.  Un portrait d'elle et de ses enfants  fut 
présenté  lors  de  l'exposition sur VERGENNES  au  musée-
galerie de la SEITA en 1987 - n° 247 du catalogue (1) -.

     Plusieurs expéditions de ce contrat furent demandées, 
la dernière en date du 8 mai 1826 :  l'indemnité de Saint-
Domingue  pointait  à l'horizon.  La page  d'une  histoire 
violente,   commencée  dans  les  couleurs  légères   d'un 
Watteau, était tournée.
  Le 1er février 1828, il ne reste qu'un seul "ayant-droit 
réclamant"   pour   toucher  l'indemnité  due   au   titre 
d'"héritier de l'ancienne propriétaire,  sa mère" :  c'est 
M. JUCHEREAU de SAINT-DENIS :
- la sucrerie VERGENNES ci-devant SÉDIèRE à la Petite-Anse 
lui rapportera 53.344F 80,
- les 2/3 des Fonds Blancs : 1.066F 60,
- enfin 435F lui seront versés pour une caféterie,  petite 
place St-Denis, à l'Accul.

     Constantin  de  VERGENNES ne touchait rien des  biens 
que sa femme apportait en dot comme seule héritière de  sa 
mère.  De  nombreux procureurs avaient été nommés dès 1782 
pour  "faire mettre seigneur et dame comte et comtesse  de 
VERGENNES,  mineurs  émancipés,  en possession  des  habi- 
tations de la Petite Anse et des Fonds Blancs." Parmi eux, 
on  peut  citer  M. LARCHEVêQUE  THIBAULT.  Mais  le  plus 
étonnant sera celui que Constantin GRAVIER de VERGENNES va 
nommer  le  24 ventôse an XI pour  "régir,  recouvrer  les 
loyers,  effectuer les recouvrements",  etc.  Si le nom du 
procureur Charles DOYHENARD,  ancien colon de St-Domingue, 
domicilié à Villefrancque arrondissement de Bayonne,  peut 
ne pas être retenu,  la date, elle, doit l'être. En effet, 
le 24 ventôse an XI (16 mars 1803),  Mr de VERGENNES  fait 
preuve  d'un  bel optimisme sur l'état de son  habitation, 
aux  environs  du  Cap,  après 12 ans de  révoltes  et  de 
destruction  quasi totale des sucreries,  ou  alors  d'une 
certaine inconscience s'il pense que, malgré les nouvelles 
qui  ne  peuvent  pas ne pas évoquer  le  désastre  qu'est 
l'expédition de Saint-Domingue et la mort de son chef,  le 
général LECLERC,  en novembre 1802, il reprendra l'exploi- 
tation de sa sucrerie comme si rien ne s'était passé.   

     Après une vie où le militaire Constantin de VERGENNES 
se  distingua,  notamment  à l'Armée des  princes  pendant 
l'émigration,  et  un  passage dans la diplomatie en  1787 
comme ministre plénipotentiaire de l'Electeur de Coblentz, 
il  rentrait  en France en  1802,  épousait  à  Dôle,  par 
contrat  devant  Me Brunet,  le 18 brumaire an XII (10  11 
1803),  Claire Philippine de RECULOT, née le 12 mai 1786 à 
Azans,  fille  de  Pierre  Nicolas  Vincent  et  Gabrielle 
Joséphine de PORTHIER.  Il décédait à Sablonville, commune 
de Neuilly (92), le 12 septembre 1832, âgé de 71 ans. 
  Auparavant,  l'indemnité de Saint-Domingue était venue à 
lui par un détour inattendu mais logique,  après les décès 
arrivés dans la famille.  Le 1er juin 1828, "par représen- 
tation  de son frère Charles Joseph,  de  son  petit-neveu 
Denis Louis de LENTILLAC de SÉDIèRE,  qui avait hérité  de 
sa grand-mère",  18.154F 17 lui étaient versés sur l'habi- 
tation Leige au Rochelois, paroisse du Fond des Nègres.
  Son frère Louis Charles Joseph, veuf de Claire Gabrielle 
PINEL  de  LA PALUN,  rentré en France après une  carrière 
militaire  bien  remplie qu'il termina  maréchal  de  camp 
comme son frère,  s'était remarié le 27 décembre 1820 avec 
Marie  LEDOUX  et,  devant  Me  Chresty,  déclarait  qu'il 
n'avait  pas d'enfant.  Son décès survenait deux mois plus 
tard, le 25 février 1821.  

     Quant  à  la famille LENTILHAC de  SÉDIèRE,  il  faut 
signaler  le  mariage d'un autre de ses membres  avec  une 
créole.  Né  au  château  de Sédière,  près  de  Tulle  en 
Limousin,  vers  1745,  fils  d'Armand Régis  et  de  dame 
Léonarde  de MAILHARD de LA VERNHOLE,  le comte de SÉDIèRE 
épouse,  paroisse de Vic,  mairie de Capdenac dans le Lot, 
le 22 août 1769,  Charlotte Cécile CASSAIGNE de LA  NUSSE, 
née  au  Cap Français le 19 novembre 1751.  Il  fera,  lui 
aussi,  campagne  dans  l'Armée des princes  et  mourra  à 
Londres, paroisse Saint-James, le 12 juillet 1801.   

 (1)  renseignement  aimablement  communiqué  par  Monique 
Constant,  conservateur  en chef aux archives du ministère 
des Affaires étrangères. 





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