G.H.C. Numéro 62 : Juillet-août 1994 Page 1107

Pierre Emmanuel PIAUD à la Guadeloupe sous la Révolution

"PIAUD est un métropolitain.  Il semble avoir appartenu  à 
l'entourage  de  Victor  HUGUES,  ce qui lui  vaut  d'être 
qualifié de guillotineur ; mais en 1801, c'est un notable, 
un  des bénéficiaires de l'adjudication des habitations  : 
il  tenait notamment à ferme,  une sucrerie dans le canton 
de Pointe-à-Pitre."
"Pour  assurer le gouvernement de la  Guadeloupe,  PELAGE, 
général noir,  met en place un gouvernement provisoire.  A 
ce conseil il faut adjoindre PIAUD,  en qualité de  secré- 
taire général".

Dans "Histoire de la Guadeloupe", tome II, de LACOUR, nous 
trouvons page 355 :
"Aussitôt  que  les Anglais avaient évacué le fort  Saint-
Charles,   Victor  HUGUES  envoya  fonctionner  dans   les 
communes   des   Iles-sous-le-Vent  un  tribunal   révolu- 
tionnaire.  Il était composé de CONSEIL,  président, PIAUD 
et LAVOLETTE,  juges. Ce tribunal ouvrit ses séances, à la 
Pointe-Noire,  le 16...  1794....  Dans la même séance, et 
d'un  seul coup,  le tribunal envoyait à la  mort  Prosper 
PÉRIER, pêcheur, Blanc LABANE, ci-devant géreur de l'habi- 
tation   Mauret,    Jean   BOQUET,   cultivateur,   Joseph 
DESFONTAINES,  habitant, DESFONTAINES fils, TABAGO, Joyeux 
DUPRÉ,  Philibert BÉNARD, la dame veuve LALBIGNE (79 ans), 
impotante et retombée en enfance". Au total : 8 personnes.

Leur seul tort aurait été,  semblerait-il,  d'avoir  prêté 
serment  aux  Anglais  lorsque ceux-ci  occupaient  l'Ile. 
Passons encore,  si l'on veut faire des  exemples,  encore 
que  ...  Mais  pourquoi cette pauvre vieille qui  n'avait 
plus esprit et que l'on dut porter au lieu d'exécution sur 
une chaise ?

p. 445 :
"Les  insurgés  (conduits par le mulâtre  GAYOTTE  et  les 
Noirs  ADAN  et JOLICOEUR,  les nègres  de  Marie-Galante) 
étaient armés comme on l'est dans une insurrection, c'est-
à-dire de tout ce qu'ils avaient pu saisir (je pense qu'il 
faut  entendre bâtons,  machettes,  fourches).  Bon nombre 
d'entre eux avaient cependant des fusils. C'était alors P. 
PIAUD  qui était commissaire délégué.  Il avait succédé  à 
GAUGNERY, devenu odieux par sa tyrannie. Il (PIAUD) envoie 
aux  insurgés  des  parlementaires et ouvre avec  eux  une 
négociation.  Il  leur  fait de grandes  promesses  et  ne 
refuse  que  ce qui est nécessaire pour faire traîner  les 
choses  en  longueur  et donner  au  secours  qu'il  avait 
demandé à la Guadeloupe le temps d'arriver. Ce que voulait 
surtout  PIAUD c'est que ceux qui étaient à la tête de  la 
révolte  se  fissent  connaître.  Il  fit  comprendre  aux 
insurgés  qu'il  ne  pouvait traiter  définitivement  sans 
l'intermédiaire des chefs et s'y prit de telle sorte qu'il 
persuada  les  meneurs  de se mettre  en  évidence  et  de 
prendre  même  les  insignes du commandement.  Ce  ne  fut 
qu'après  trois  jours d'anxiété que  le  secours  demandé 
arriva. GAYOTTE, ADAM et JOLICOEUR furent saisis, jugés et 
condamnés  dans les vingt-quatre heures par une commission 
militaire. On les fusilla sur la savane Bosredon. Cet acte 
de vigueur calma l'insurrection.  Les Noirs rentrèrent sur 
leurs habitations respectives.  Les Noirs de Marie-Galante 
(...) ne commirent ni meurtre, ni pillage, ni incendie".

Malgré mes recherches,  je n'ai pu retrouver la remise des 
drapeaux par PIAUD. Cependant que dans le "Moniteur", nous 
lisons  la flétrissure qu'il encourut avec ses collègues à 
la  suite  de son incarcération pour  avoir  appartenu  au 
Conseil provisoire présidé par PELAGE. Voici ce que dit le 
Moniteur du 9 octobre 1802 (t. III, p. 350) :
"Les  dernières nouvelles de la Guadeloupe sont de la  mi-
août. Le général LACROSSE avait été rétabli dans son poste 
de  capitaine  général et y avait été reçu avec  toute  la 
pompe nécessaire pour réparer l'outrage qui avait été fait 
par une poignée de brigands à l'agent du gouvernement.  Il 
est temps que les colonies apprennent qu'il n'y a point de 
grâce pour ceux qui espéraient de troubler l'ordre, et que 
le  gouvernement fera sévèrement exécuter les lois  envers 
ceux   qui  se  révolteraient  contre  l'autorité  de   la 
métropole...  Les  individus  qui  composaient  le  comité 
d'insurrection, soi-disant Conseil provisoire, qui avaient 
insurgé la colonie contre le capitaine général,  sont dans 
les  prisons  de Brest,  et vont être traduits devant  les 
tribunaux.  Les tribunaux sentiront l'importance de  leurs 
fonctions  :  il n'y aurait plus de colonie ni  d'autorité 
nationale  si  une  poignée  d'individus  pouvait  espérer 
l'impunité en réussissant à ourdir des complots contre les 
agents du gouvernement".

Nous  avons vu ce qu'il en était de  la  condamnation.  Je 
n'ai  pas cherché si le "Moniteur" avait plus tard rétabli 
la vérité.

De Pierre Emile PIAUD,  nous avons le signalement  émanant 
du  ministère  de la Marine et des colonies,  lors de  son 
retour  aux  îles,  après la remise des  trophées  et  des 
drapeaux.

Au nom du Directoire exécutif : passeport.

Le  Ministre de la Marine et des colonies prie et requiert 
tous corps administratifs, officiers civils et militaires, 
chargés de maintenir l'ordre public,  et tous autres qu'il 
appartiendra  de laisser librement et sûrement  passer  le 
citoyen  Pierre PIAUD,  député auprès du gouvernement  par 
les agents du directoire exécutif aux Iles-du-Vent :
Agé de vingt-sept ans, né à La Rochelle, district (néant), 
département de la Charente Inférieure
Taille de cinq pieds deux pouces (soit un peu plus de 1,70 
m.),  cheveux  et sourcils noirs,  yeux noirs,  nez  long, 
bouche  moyenne,  front  rond,  menton fourchu  et  visage 
ovale.
Sans  lui  donner ni souffrir qu'il lui soit  donné  aucun 
trouble ni empêchement,  mais au contraire,  lui accorder, 
en cas de besoin,  toute aide et assistance; ledit citoyen 
Pierre PIAUD se rendant de Paris à Rochefort, à l'effet de 
s'y  embarquer  pour la Guadeloupe pour le service  de  la 
République.
Le  présent passeport valable pour un mois,  a été délivré 
en conformité de l'ordre du gouvernement.

Fait à Paris, le seize ventôse, l'an IV de la République.
Signé : TRUGUET
Ministre de la marine & des colonies






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