G.H.C. Bulletin 76 : Novembre 1995 Page 1454

Deux familles créoles :
Les DU BOURG de LA LOUBèRE à Saint-Domingue;
Les SAINTE-MARIE à la Jamaïque

Georges de Sainte Marie

1. Les origines des DU BOURG de LA LOUBèRE

     Les DU BOURG,  qui vinrent s'installer à  St-Domingue
en  1765,  étaient une ancienne famille du  Languedoc.  Au
début  du  XVIIème  siècle,  ils étaient seigneurs  de  la
Loubère  et de Saint-Christaud,  un château et un  village
situés près de Rieux-Volvestre,  au sud de  Toulouse.  Une
étude  d'Henry DU BOURG (Recherches sur la Maison DU BOURG
- P.  Rivière et Cie.,  Toulouse,  1881) les fait remonter
jusqu'à Guillaume François DU BOURG,  capitoul de Toulouse
en  1199.  Mais les papiers de famille que je conserve  ne
débutent la généalogie qu'à Bernard François DU BOURG.  Il
était  vraisemblablement le fils de Marc Antoine DU  BOURG
et  de Peyronne de BARRAU,  et le petit-fils d'Antoine  DU
BOURG et de François de LUPPÉ.
    Bernard François épousa Jeanne de LASTOURS vers 1600 :
ils eurent un premier fils,  François,  qui épousa à Rieux
le 7 janvier 1623,  Françoise DELPECH,  fille de feu noble
Pierre  DELPECH,  seigneur  de la  CROIX-FALGARDE,  et  de
Jeanne  DEBZAT.  De  ce  mariage naquirent au  moins  deux
enfants :  Louis et Jeanne (qui épousa noble Jean  Jacques
de SERRES, seigneur de Montels).

     Le  contrat de mariage de Louis,  seigneur de  Saint-
Christaud, et d'Anne HUNAULT fut signé le 5 septembre 1668
au  château de Larrouzet,  près de Rieux.  De cette  union
naquirent trois fils et une fille :  Joseph, officier dans
la  1ère  compagnie des Mousquetaires  du  Roi,  François,
François-Pierre  et  Rose,  qui épousa noble  François  de
JULIANIS de SAINT JULIEN.
     Après  la mort de Louis,  le château de la Loubère et
la  terre  de Saint-Christaud revinrent  au  second  fils,
François. Celui-ci mourut, apparemment sans descendance, à
la fin de 1714.  Il fit son testament, malade et alité, en
son château de la Loubère,  le 11 novembre 1714, demandant
à être enterré dans le cimetière des pauvres. Il léguait à
son  frère,   François-Pierre,  la  somme  de  500  livres
(s'ajoutant  aux  10.000 livres qu'il lui  avait  assurées
dans  le  contrat de mariage de ce dernier),  à  sa  soeur
Rose, 500 livres et ses biens mobiliers, à sa nièce, Marie
de  JULIANIS,  une  bague  en or,  à son  valet  Dominique
CONTIEUX,  20 livres, à Micheline NOURRINE, sa servante, 6
livres,  et  20 livres à distribuer aux pauvres.  Sa  mère
Anne  recevait l'usufruit de tous les biens  qui  devaient
revenir, après sa mort, à l'aîné Joseph, le mousquetaire.

     Nous  ne  savons ni si la Loubère et  Saint-Christaud
revinrent  bien  à Joseph,  ni s'il se maria  et  eut  une
descendance,  mais  les deux terres n'allèrent pas dans le
patrimoine  du  cadet François-Pierre  (quoique,  nous  le
verrons,  certains de ses descendants portèrent le nom  de
ces deux terres).
     Nous  ne savons rien non plus du genre de vie des  DU
BOURG.  On  croit  seulement entrevoir  l'existence  assez
modeste de la petite noblesse rurale moyennement fortunée.
Le  pays est resté pauvre :  d'amples  vallonnements,  une
terre  sèche,  des  moutons  et des  chèvres,  des  routes
étroites sur les crêtes dominant le paysage. L'état actuel
du "château" de la Loubère,  qui existe encore,  en est le
témoignage. Ce n'était pas une importante construction. De
l'ancien château ne subsiste aujourd'hui que la tour;  les
écuries,  qu'on  disait d'inspiration  mozarabe,  ont  été
détruites  en  1979 par l'actuel  propriétaire,  M.  Louis
PATTE. Le reste de la maison date du XIXème siècle.

     Ce  mince  état de fortune fut  vraisemblablement  la
raison majeure pour la branche cadette de quitter la terre
et  se tourner vers le commerce à Bordeaux.  Au reste,  la
fin  du  règne de Louis XIV laissait  le  Languedoc,  plus
encore que le reste du pays,  dans un triste état. L'atti-
rance  du commerce avec les îles donnait de  plus  grandes
espérances.  C'est  ainsi  qu'une famille  allait  changer
complètement d'horizons, alors qu'elle y semblait bien peu
préparée.

2. Bordeaux

     François-Pierre  DU BOURG vint s'établir à  Bordeaux,
rue du Parlement,  paroisse Saint-Pierre, pour épouser, le
12 septembre 1713,  Catherine DUTUC,  fille de feu messire
Charles DUTUC, écuyer, qui possédait des biens nobles dans
la  paroisse de Saint-Jean-lès-Blaignac,  et de feue  dame
Marie  de GUILHON.  Catherine recevait de sa  tante  Renée
DUTUC,  chez laquelle elle habitait rue d'Arnansicaise, la
somme de 15.000 livres,  et François-Pierre,  nous l'avons
vu, 10.000 livres de son frère François.
     Ils  eurent au moins un fils,  Pierre,  qui naquit  à
Bordeaux en 1715, et une fille, Geneviève, qui épousa Jean
DUCRABON.  On retrouve des DUCRABON à Saint-Domingue :  en
particulier,  Léon DUCRABON,  natif de Bayonne, qui épousa
en  1787,  à la Croix-des-Bouquets,  Marie Sophie MATHIEU-
DESCLOCHE. Léon DUCRABON habitait au Cul-de-Sac en 1766.

     Pierre DU BOURG,  à qui l'on devra l'établissement de
la fortune coloniale de la famille, se maria deux fois :
- avec  Jeanne RATEAU,  le 2 février 1750.  Elle était  la
fille  de  Jacques RATEAU et de  Catherine  PRENIERS.  Ils
eurent deux enfants :  Louis Joseph,  "chevalier de Saint-
Christaud", né à Bordeaux en 1752, et Marie-Rosalie, née à
Bordeaux en 1757.
- avec Marguerite VOGLUZAN, le 27 août 1760. Elle était la
fille  de David VOGLUZAN et de  Marguerite  CAILLÉ-GOBEIN.
Ils eurent quatre enfants :
Joseph  Thomas Patrice,  "chevalier de la Loubère",  né  à
Bordeaux en 1761;  Pierre François,  "chevalier de Sainte-
Colombe", né à Bordeaux en 1762; Françoise Victoire, née à
Bordeaux   en  décembre  1763;   enfin,   Louis   Valentin
Guillaume,  le  futur vicaire apostolique de la Louisiane,
né à Saint-Domingue en février 1766.

Pierre  DU BOURG habitait à Bordeaux,  rue  Sainte-Colombe
(d'où probablement ce nom repris par son fils !). Il était
négociant, ayant dû mobiliser sa part de fortune terrienne
familiale,  s'occupait  de commerce maritime et  colonial.
L'acte   de  son  mariage  avec  Marguerite  VOGLUZAN   le
mentionne comme "écuyer, capitaine de navire". Le frère de
Marguerite,  Jean,  fut  curé du Trou-du-Dondon  à  Saint-
Domingue  en  1771.  Ce sont probablement  en  partie  les
intérêts  des  VOGLUZAN qui attirèrent Pierre DU  BOURG  à
Saint-Domingue.



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Révision 24/12/2004