G.H.C. Bulletin 78 : Janvier 1996 Page 1517

Antillais à Panama Guy Stehlé

    Ce n'est pas à vous, auditeurs (*) de la  région pari-
sienne,  que  j'apprendrai  que  les  Antillais   quittent
parfois  leur  île  natale  pour  aller  gagner  leur  vie
ailleurs. Ce phénomène n'est pas récent et la  destination
n'était pas toujours la Métropole. Ainsi,  entre  1846  et
1914, de nombreux Guadeloupéens et Martiniquais partent en 
vagues successives pour Panama.

     Pourquoi Panama ? C'est une longue  histoire  que  je
vais vous faire découvrir.
     Au début du XIXème  siècle,  germe  l'idée  de  faire
transiter marchandises et  voyageurs  à  travers  l'isthme
étroit qui sépare l'océan Atlantique du Pacifique au  lieu
de faire le tour de l'Amérique du  sud.  Compte  tenu  des
moyens techniques de  l'époque,  la  première  réalisation
sera, entre 1846 et 1856, la construction d'un  chemin  de
fer transisthmique.
     Dès 1846, avant l'abolition de l'esclavage,  quelques
Martiniquais partent clandestinement par  Sainte-Lucie  ou
la Barbade; c'est cependant surtout  entre  1849  et  1856
que, toujours par les mêmes voies, environ un  millier  de
Martiniquais émigrent vers Panama. Peu ont  survécu;  ceux
qui y ont réussi  se  sont  installés  dans  les  villages
longeant la voie ferrée pour se consacrer au  commerce  de
détail ou à la petite hôtellerie.
     Plus tard, Ferdinand de Lesseps, le célèbre ingénieur 
français qui avait réalisé le canal de  Suez,  s'intéresse
au creusement, à Panama, d'un canal du même type. La  mise
en oeuvre d'un tel projet nécessita la mobilisation  d'une
abondante  main-d'oeuvre  dont  une  grande   partie   fut
d'origine caribéenne :  Cubains,  Jamaïcains,  Barbadiens,
Saint-Luciens, mais aussi Martiniquais et Guadeloupéens.

     Les travaux se sont déroulés en trois étapes :
- 1881-1888, par la Compagnie de Ferdinand de Lesseps
- 1888-1895, sous la responsabilité d'une autre  compagnie
  française, suite à la faillite de Lesseps;
- 1904-1914, sous l'égide des  États-Unis  qui  mènent  le
  projet à son terme.

     Curieusement, au cours de la période 1881-1895, alors 
que les  compagnies  sont  françaises,  notre  législation
s'oppose au recrutement  de  travailleurs  français.  Bien
sûr, cela n'arrête point Martiniquais et Guadeloupéens qui 
prennent à nouveau le chemin  de  la  clandestinité.  Rien
qu'en 1885, plus de  800  Martiniquais  partent,  en  même
temps que 9.000 Jamaïcains, 1.344 Barbadien ,  495  Saint-
Luciens et bien d'autres.
     A l'arrivée des Américains, en 1903, il  ne  subsiste
de l'expérience française qu'un millier de personnes  dont
une centaine de Martiniquais et  une  vingtaine  de Guade-
loupéens.

     La troisième  vague  d'émigrants  coïncide  avec  les
crises économiques des Antilles  françaises  depuis  1885,
l'éruption de la Pelée en 1902, et une forte sécheresse en 
1905. De plus à partir du  25  septembre  1907,  le recru-
tement  est  officiellement  autorisé  dans  les  colonies
françaises.
     Joseph Jos, Président  e  l'association  "Martinique-
Panama"  a   patiemment   dépouillé   les   archives   des
compagnies. Il en ressort que  l'émigration  des  Antilles
françaises se partage, grosso modo,  entre  2/3  de Marti-
niquais et 1/3 de Guadeloupéens, de Sainte-Rose surtout et 
de Marie-Galante. Prudemment, il avance quelques chiffres: 
1905 - 2.733 Martiniquais; 1906 -  585  .  Pour  1907,  le
premier contingent officiel de Guadeloupéens est de  2.039
personnes accompagnées de 2.224 Martiniquais.  C'est  donc
très certainement de cette année  que  datent  les  cartes
postales de Caillé montrant, à Pointe-à-Pitre, "un  départ
de travailleurs  pour  Colon".  A  la  même  époque,  deux
clichés  de  Leboullanger   illustrent   le   "Versailles"
embarquant 654 ouvriers à Fort-de-France. 1908  marque  la
fin du recrutement officiel.  En  réalité,  tout  donne  à
penser que l'émigration s'est prolongée  jusque  vers  les
années 1920 par  des  regroupements  familiaux.  Les rapa-
triements furent peu nombreux : on les estime à deux mille 
sur dix mille Antillais français ayant émigré.

     La minorité antillaise francophone, restée sur place, 
fut longtemps victime  de  sa  marginalité  et  il  faudra
attendre 1981 pour  que  les  droits  de  ses  descendants
soient officiellement reconnus.
     Dès 1917, la communauté a créé une société de secours 
mutuel, la "Société française la Fraternité",  qui  survit
encore de nos jours.
     Depuis quelques  années,  l'association  "Martinique-
Panama"  a  renoué  les  contacts,   elle   organise   des
rencontres, dépouille les registres des compagnies  et  de
la mutuelle. Qui sait,  peut-être  y  retrouverez-vous  de
lointains parents partis un jour  tenter  leur  chance  en
terre panaméenne ?

(*) NDLR Rappelons que  Guy  Stélhé  fait  des  chroniques
régulières sur Media Tropical.

COOPÉRATION

de Claude Thiébault : MORACCHINI   (p. 1432)

     Le lecteur qui voudrait avoir plus de détails sur  ce
gouverneur de la Guadeloupe pourra se reporter à mon livre 
"Guadeloupe 1899, année de tous les dangers" (L'Harmattan, 
1989) qu'a utilisé Guy Stéhlé.


de Danielle Maudet : Les LEMOINE-MAUDET pp. 622-623)

Grâce au  dépouillement  des  embarquements  fait  par  le
Cercle généalogique de l'Ouest (cf GHC  pp.  137,  167  et
1429)  nous  apprenons  que   Louise   PASTOURELLE   s'est
embarquée à Nantes sur "le Victorieux", le  6  août  1773,
accompagnée de son frère Ange... (voir en particulier  GHC
p. 622 III 2b.2 et p. 638). 


de Rolande Hlacia : les POULLET (pp. 375 et 1391)

Je conseille à André Barthélemi de consulter la généalogie   
de la famille POULLET,  de  l'origine  au  début  du  XIXe
siècle, établie par Eugène et   Raymond   Bruneau-Latouche
dans leur livre "Cinq siècles ou presque  d'histoire fami-
liale".


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Révision 28/12/2004