G.H.C. Bulletin 81 : Avril 1996 Page 1597

LE MARQUIS de MONTALET

    A Saint-Domingue, la révolte des esclaves éclata le 22 
août 1791. La disproportion des effectifs des esclaves par 
rapport aux blancs rendait impossible  de  contenir  cette
révolte. Les troupes françaises venues  aider  les  colons
s'étaient retirées, incapables  de  protéger  efficacement
ceux-ci. Les Anglais avaient ensuite pris possession de la 
colonie avec le souci d'éviter une contagion de la révolte 
à d'autres régions des Indes occidentales, y compris leurs 
propres possessions.

     Les planteurs du Sud des États-Unis n'étaient pas non 
plus indifférents à une extension possible de  la  révolte
chez eux; on craignait que les esclav s  venus  de  Saint-
Domingue ne soient, par leur seule présence, un facteur de 
contagion.

     Les Anglais demeurèrent dans l'île environ  cinq  ans
et décidèrent, en 1798, de s'en  retirer.  MONTALET  avait
commandé une milice sous leurs ordres et le fait qu'il ait 
collaboré avec eux risquait de lui créer  des  ennuis.  Il
quitta donc Saint-Domingue, en quelque sorte  pour  sauver
sa peau.

Emigration et implantation en Géorgie

     En 1798, avec son épouse Renée  Michèle  MIRAULT,  il
rejoignit Savannah où ses parents étaient  déjà  réfugiés.
Son  beau-père,  Pierre  MIRAULT  (écuyer)  était  déjà  à
Savannah où il devint boulanger.  S'étant  enfui  avec  de
l'argent et une poignée d'esclaves destinés,  semble-t-il,
à son service personnel, MONTALET  acheta  à  Savannah  la
plantation de l'Hermitage, puis une partie importante  des
plantations de l'île de Sapelo dont le précédent  proprié-
taire, pendant la période  coloniale,  avait  été  Patrick
MACKAY, lequel avait possédé toute l'île et  également  la
plantation de l'Hermitage.

     Quand MONTALET acheta l'Hermitage, la  superficie  de
la plantation était de 220 acres, avec environ 65 esclaves 
employés, en plus de ceux qu'il avait amenés avec  lui  de
Saint-Domingue.  Après  le  décès  de  son  épouse,  Renée
Michèle Olive MIRAULT, pendant l'été 1800, il  se  remaria
en octobre 1802 avec Servanne de  BOISFEUILLET,  fille  de
PICOT de BOISFEUILLET, arrivé en  Géorgie  directement  de
France pendant la Révolution.  Il  devint  alors  adminis-
trateur des biens des BOISFEUILLET à  Sapelo  (environ  le
cinquième de l'île ou  2.000  acres).  A  la  même  époque
(1803), une annonce parut dans un journal de Savannah pour 
la vente d'une autre propriété à Sapelo,  dans  la  partie
nord-est de l'île, "Hight Point".  Thomas  DECHENEAUX  fut
chargé de cette vente au profit de plusieurs Français  qui
avaient été copropriétaires de Sapelo et ce  fut  ce  lot,
ancienne propriété de McKay, déjà  mentionnée  plus  haut,
que MONTALET acheta (400 acres dans la partie nord-est).

     Aux environs de 1802-1803, MONTALET habitait de façon 
saisonnière à Hight Point. La propriété  des  BOISFEUILLET
l'entourait dans la partie est. Au voisinage  se  trouvait
la plantation de cacao de Sapelo où  vivait  le  capitaine
SWARBRECK qui l'avait créée, et également Thomas SPALDING, 
le plus célèbre des propriétaires de Sapelo  qui  habitait
dans la partie sud de l'île.

     PICOT de BOISFEUILLET, cité plus haut, était l'un des 
cinq Français venus de France de 1789 à 1794. BOISFEUILLET 
tua son neveu CHAPPEDELAINE en 1794 et  il  fut  poursuivi
pour meurtre, mais il ne fut  pas  condamné  et  mourut  à
Sapelo en avril 1800. Son épouse décéda l'année  suivante.
Leur  fille,  Servanne  de  BOISFEUILLET,  quand  MONTALET
l'épousa en 1802, était  leur  très  jeune  héritière.  Il
avait quarante ans et elle quinze. Dix ans auparavant,  il
avait déjà épousé sa première femme avec aussi une  grande
différence d'âge. Ils furent mariés en 1802 par un pasteur 
presbytérien, car à l'époque il n'y avait  pas  de  prêtre
catholique à Savannah. Ils retournèrent  ultérieurement  à
l'église catholique pour faire  confirmer  leur  union  (5
avril 1804).

    Selon le testament de M. de BOISFEUILLET, la propriété 
de Sapelo ne devait pas être partagée avant  que  le  plus
jeune des enfants ait 21 ans ou soit décédé.  Servanne  de
BOISFEUILLET épouse MONTALET est  décédée  en  1805.  Elle
repose, ainsi que Renée Michèle, la  première  épouse,  au
cimetière du Parc colonial de Savannah.  A  cette  époque,
MONTALET était encore jeune, 43 ans, et il ne  semble  pas
s'être de nouveau remarié.

Parentèle

     Denis COTTINEAU de KERLOGUEN, beau-frère de  MONTALET
dont nous avons parlé plus haut, est un héros de la  Révo-
lution américaine. Il a  été  planteur  à  Saint-Domingue,
délégué aux États-Généraux à Paris en 1789. Il fut  membre
de la Société  des  Cincinnati.  Il  épousa  la  soeur  de
MONTALET en 1787. Leur  fils,  Achille  COTTINEAU,  mourut
jeune en 1812.

     L'une des personnes ayant joué un rôle dans la vie de 
MONTALET est le capitaine Edward SWARBRECK, propriétaire à 
Sapelo par  héritage  de  son  beau-père,  Richard  LEAKE.
C'était un Anglais catholique du Lancastershire. Il  était
capitaine dans la marine, faisant  du  commerce  avec  les
usines de Liverpool. Arrivé à Boston vers 1780, il  épousa
en premières noces, en 1796, Élizabeth FARLEY (1757-1807), 
veuve de George BASIL-SPENCER.
    Lorsqu'elle mourut, en 1807, tout  comme  MONTALET  il
épousa, en 1809, une jeune héritière,  Bonne  de  BRÉBISE;
elle avait entre 15 et 16 ans et lui environ 50 ans.  Elle
était la fille  adoptive  (ou  pupille)  de  la  soeur  de
MONTALET, Mme COTTINEAU de KERLOGUEN, elle aussi  réfugiée
de Saint-Domingue. Tous deux étaient  de  religion  catho-
lique mais très différents : elle, menue et charmante,  et
lui d'aspect massif  et,  bien  qu'aimant  la  vie  et  la
plaisanterie, d'aspect plutôt renfermé.
     De son mariage avec Bonne de  BRÉBISE,  le  capitaine
SWARBRECK eut un fils, Raoul, qui mourut en bas âge.

    Toute la famille de MONTALET, sa soeur Mme  COTTINEAU,
sa fille adoptive Mme SWARBREACK, son jeu e  frère  Louis-
Eugène de MONTALET, tous plus ou moins parents et tous  de
religion catholique vivaient dans une sorte de  communauté
très particulière, sous l'égide de l'abbé  CARLES,  prêtre
catholique vivant  sous  le  toit  de  Mme  COTTINEAU.  Ce
dernier était adoré de tout le monde, très empressé auprès 
des fidèles,  aimant  jouer  et rire,  bref,  d'un  aspect


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