G.H.C. Bulletin 85 : Septembre 1996 Page 1713

La famille d'ALESSO et l'habitation "Frégate"

     Cette tentative pour  reconquérir  la  confiance  des
plus hautes autorités et la volonté  d'effacer  une  répu-
tation le poursuivant depuis la capitulation de 1762 n'eut 
pas d'aboutissement immédiat.
Il fallut attendre encore trois ans pour  que  le  nouveau
gouverneur général, le comte d'ENNERY prenne  l'initiative
de  demander  des  décorations  en  faveur   de   certains
habitants qui s'étaient distingués dans la  formation  des
milices. La  sollicitude  du  gouverneur  à  l'égard  d'un
habitant ayant  le  passé  sulfureux  d'ALESSO  s'explique
peut-être par le mariage que  fit  Ennery  avec  Bénédicte
d'ALESSO (20).
     Quoi qu'il en soit, voici le commentaire que  portait
le gouverneur sur notre homme :

     "(...) M. Claude François d'Alesso, marquis d'Éragny, 
actuellement Capitaine de  dragons  dans  le  quartier  du
François, il a servi en France comme Cornette  et  a  fait
trois campagnes dans Turenne cavalerie, revenu dans  cette
colonie, à la Paix, il a passé à Saint-Domingue avec M. le 
Marquis Dantin, commandant les volontaires  de  la  Marti-
nique, il a commandé la noblesse le dernier siège et a été 
blessé au pied  d'un  coup  de  feu;  c'est  un  homme  de
condition, petit-fils d'un ancien général  icy,  il  s'est
très bien conduit dans  cette  formation  des  milices  en
demandant de l'Emploi des premiers et cy  tenant  de  très
bon propos. Je prie Monseigneur le Duc de Choiseul d'avoir 
égard à ma demande (...)" (21).

     Finalement,  Claude-François  d'ALESSO  d'ÉRAGNY  fut
fait chevalier de Saint-Louis le 1er mai 1770 et reçu cinq 
ans plus tard son "brevet pour tenir rang de colonel  sans
appointements".
Il avait déjà derrière lui une longue carrière  militaire,
effectuée en partie en France. Lors de cette  distinction,
il ne fut nullement fait référence à  ses  initiatives  de
1762. La bienveillance d'ENNERY  se  manifesta  encore  en
1770 lorsqu'il proposa au roi quatre  personnes,  dont  M.
d'Éragny, qu'il jugeait "propres par leurs services,  leur
naissance et leurs  qualités  à  commander  la  noblesse".
(22).

   Après une vie presque entièrement passée en Martinique, 
Claude-François  d'ALESSO,  marquis  d'ÉRAGNY,  petit-fils
d'un gouverneur général arrivé sur cette île quatre-vingt- 
dix ans auparavant, mourut à Saint-Pierre le 2 mai 1780.

Notes

(1) Il repose aujourd'hui dans le choeur de la  cathédrale
Saint-Louis de Fort-de-France avec  ses  successeurs,  les
gouverneurs généraux Blénac et d'Amblimont.
(2) actuellement Ducos.
(3) La version originale de cette carte, propriété  de  la
Bibliothèque nationale, est de très  grande  taille.  Elle
est  donc  difficilement  consultable,  mais   une   copie
d'époque sur calque, conservée aux Archives d'Outre-mer  à
Aix en Provence (DFC  Pf.  16  B  doc.  320),  reprend  de
manière fidèle le  tracé  de  ce  document  irremplaçable.
Malheureusement, plusieurs feuillets dont celui  qui  nous
concerne ne portent pas les indications  sur  le  nom  des
propriétaires.
(4) Service Historique de la Marine  (Vincennes)  "Routier
de la Martinique, fonds  du  service  hydrographique,  no.
213, planche 86.
(5) Archives départementales  de  la  Martinique,  Conseil
souverain, B 10, f° 78 v°.
(6) D'après les notes et documents de J. Petitjean-Roget.
(7) Archives départementales  de  la  Martinique,  Conseil
souverain, B 6, f° 264 v°.
(8) Archives d'Outre-mer (CAOM), C/8A/54, f° 155.
(9) Cette Chambre  était  mi-partie  d'Agriculture  et  de
Commerce.
(10) Cette réalité était de plus d'ordre  réglementaire  :
"Le roi, en 1702, astreignit  les  capitaines  à  demeurer
dans le quartier dont ils  avaient  la  charge  et  menaça
d'ôter leur emploi à ceux qui  enfreindraient  cet  ordre.
Une ordonnance royale établit qu'à l'avenir les  habitants
ne pourraient être nommés officiers de milice que dans  le
quartier de leur résidence habituelle". L. Chauleau. "Dans 
les îles du Vent. La Martinique".
(11) Le problème des impostures, lié à l'absence de moyens 
de communication rapides, n'était pas nouveau.  Ainsi,  le
Père Labat nous relate dans le tome  II  de  son  "Nouveau
Voyage aux Isles d'Amérique", la visite de l'archevêque de 
St-Domingue, primat des Indes Occidentales  en  Martinique
durant l'année 1698. Au bout de quelques jours et sous  la
pression d'une rumeur, les autorités firent savoir discrè- 
tement et avec force  diplomatie  au  prélat  qu'il  était
souhaitable  qu'il  montrât  les  documents  prouvant  ses
titres afin de calmer les esprits.
(12) CAOM, C/8B/10, f° 39.
(13) CAOM, F3, article 27, doss. 539.
(14) Ibid.
(15) CAOM, C/8A/62, f° 506.
(16) CAOM, C/8A/64, f° 285.
(17) CAOM, F3 article 28, doss. 234.
(18) CAOM, F3 article 28, doss. 287.
(19) CAOM, C/8A/65, f° 2.  Dans l'index de l'inventaire de 
cette série C8, E.  Taillemite  indique  qu'il  s'agit  de
Claude-François d'Alesso, marquis d'Éragny.  Il  n'en  est
rien, car l'auteur  aura  confondu  les  deux  frères.  Le
document  d'archives  parle  du  sieur  d'Alesso  et   non
d'Éragny, la différence de termes ayant une grande  impor-
tance  puisque  seul  Claude-François,  qui  est   marquis
d'Éragny, peut porter ce nom. Le patronyme ALESSO  employé
seul  désigne  donc  Claude-Alexandre.  D'autre  part,  la
procuration (cf. ADM, Conseil souverain, B10  , f° 78  v°)
que Claude-François fait en faveur de son frère, en  1763,
pour qu'il gère ses biens en France confirme ce départ  de
Claude-Alexandre pour la France cette année-là.
(20) Il s'agit d'une fille de Claude-Alexandre d'Alesso.
(21) CAOM, C/8B/11, f° 59.
(22) CAOM, C/8A/69, f° 325.

COOPÉRATION

de David Quénéhervé : ABEILLE (pp. 210-211)

Archives départementales du Finistère 1  Q  2566  :  maison  de
commerce de  Louis  Honoré  ABEILLE,  négociant  de  Marseille,
émigré.  Séquestre  de  "La  Gentille  Marguerite"  et  de   sa
cargaison de café et de sucre.


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Révision 28/12/2004