G.H.C. Bulletin 84 : Juillet-Août 1996 Page 1692

COMPTE RENDU DE LECTURE
Henri de Frémont

            Sugar and Slavery, Family and Race
        The Letters and Diary of Pierre Dessalles,
             Planter in Martinique, 1808-1856 
    Edited and translated by Elborg and Robert Forster
                  Department of History
  Johns Hopkins Studies in Atlantic History and Culture
 The Johns Hopkins University Press, Baltimore and London

     On dit souvent que les étrangers s'intéressent plus à 
la France, à son passé, à ses moeurs, à sa civilisation... 
que les Français eux-mêmes. Ce doit  être  vrai,  si  j'en
crois cette récente expérience :
     De 1980 à 1986, j'ai  publié  en  cinq  volumes  deux
manuscrits inédits de mes aïeux les Conseillers au Conseil 
souverain de la Martinique :
- Pierre François Régis  DESSALLES  (auteur  des  célèbres
"Annales du Conseil souverain de la Martinique...",  1784,
récemment rééditées par les Archives départementales de la 
Martinique) :  "Historique  des  Troubles  survenus  à  la
Martinique pendant  la  Révolution"  (1  vol.,  480  pp.),
republié récemment en microfilm par une Société anglaise.
- Pierre François Marie Dieudonné DESSALLES, qui  tint  un
"Journal" durant presque toute sa vie : "La Vie d'un Colon 
à la Martinique au XIXème siècle" (4 vol., 1.315 p.). 
     Sans  aucune  publicité,  cette  édition  a  reçu  un
accueil favorable en France et surtout en Martinique, mais 
essentiellement  auprès  des   descendants   de   familles
créoles; les autres Français sont restés -  sauf  quelques
historiens - très indifférents. Par  contre,  acquise  par
plusieurs   Universités   étrangères,   elle   a    retenu
l'attention, entre autres, de Robert  Forster,  professeur
au Département d'Histoire de l'Université Johns Hopkins de 
Baltimore : celui-ci, estimant que cette  "histoire"  d'un
Colon français à la Martinique méritait d'être portée à la 
connaissance du public - notamment étudiant - de son pays, 
a projeté d'en publier en anglais de larges extraits. 

     Avant d'en  agréer  le  manuscrit,  l'éditeur  (Johns
Hopkins  University  Press)  a   sollicité   l'avis   d'un
"expert", dont voici l'essentiel :
"Voici un document remarquable,  merveilleusement  traduit
et bien présenté. Je ne connais rien de tout à fait compa- 
rable. Certainement pas pour la Martinique,  ni  pour  les
Antilles et les Amériques en général (...). 
Mais le Journal de Pierre Dessalles  est  autrement  inté-
ressant. Il nous donne les pensées et les actions  journa-
lières d'un planteur important pendant une longue  période
riche en transformations de la société et, en même  temps,
présente l'histoire de la vie de Dessalles lui-même.
Le Journal est un témoignage extraordinaire de l'évolution 
historique et de la fin de l'esclavage à la Martinique. Il 
offre une vue privilégiée de l'intérieur de cette  société
et donne un sens des relations humaines vécues  qu'il  est
impossible d'obtenir en étudiant des  documents  officiels
et imprimés de l'époque. De plus, il contient une quantité 
immense d'informations sur des sujets de grand  intérêt  :
le maintien de la force de travail esclave, les rythmes de 
travail,  punitions  et  récompenses,  la  fabrication  du
sucre, les critères de standing  social  dans  la  société
coloniale, la relation entre famille, propriété  et  héri-
tage, quelques aperçus sur les relations  transatlantiques
des planteurs et les relations politiques changeantes.
 
Mais, en fin de compte, ce qui fait la force de ce Journal 
c'est l'effet combiné de tout cela, vu  par  les  yeux  de
Pierre Dessalles. A mon avis, le résultat  est  une  image
tout à fait remarquable de  l'évolution  de  la  mentalité
d'un planteur (...).
Je pense  que  ce  livre  suscitera  le  vif  intérêt  des
historiens des Antilles, de l'esclavage et des  Amériques.
Je pense même qu'il  sera  apprécié  par  les  "historiens
culturels" qui sont en train  de  discuter  des  questions
comme l'identité culturelle, le colonialisme,  les  menta-
lités, etc."

     Ce livre de quelque 320 pages n'est ni un résumé,  ni
un  condensé;  je   l'appellerais   volontiers   "Morceaux
choisis"  :  nombreux  extraits   fidèlement   transcrits,
montrant en effet tous ces aspects  caractéristiques  bien
saisis par l'expert.
     Cette  traduction-arrangement-publication  nous  fait
honneur et participera sans  nul  doute  à  une  meilleure
compréhension par ses  lecteurs  de  langue  anglaise  des
particularités et des charmes de nos  Isles  et  de  leurs
habitants passés, présents et... futurs.

(L'édition-princeps  peut  encore  offrir  quelques  exem-
plaires à des lecteurs français :
                  4 tomes, 500F franco, 
  Dr H. de Frémont, 51 rue de Visien, 92400 Courbevoie) 

NOTES DE LECTURE
David Quénéhervé

             Mémoires d'une famille huguenote 
       victime de la révocation de l'édit de Nantes
                     Jacques Fontaine
         présentation et notes de Bernard Cottret

Ecrit en 1722 "pour l'usage  de  tous  ses  enfants",  par
Jacques Fontaine, "huguenot récalcitrant, né près de Royan 
en 1658". 
     De la page 52 à 55, il parle  de  la  famille  de  sa
femme, les BOURSIQUOT. Les parents  de  celle-ci  étaient,
lui, de Taillebourg, à deux lieues  de  Saintes,  et  elle
fille unique d'un GUILLOT, marchand  de  soie  de  St-Jean
d'Angély. Des dix frères et soeurs Boursiquot,  "Aaron  et
Guillot, les 2ème et 3ème garçons, étant venus à l'âge  de
25 et 26 ans,  n'ayant  reçu  aucune  éducation  et  point
d'emploi, furent envoyés avant la mort du père à l'île  de
la Martinique,  avec un couple de serviteurs  et  quelques
provisions, où, n'ayant pas assez de quoi  faire  un  éta-
blissement, ils s'engagèrent avec les gens  du  pays  pour
aller en flibuste contre les Espagnols et, après plusieurs 
voyages, Aaron a été tué. Guillot,  un  homme  robuste  et
martial, s'est marié avec une créole dont on dit  qu'il  a
eu plusieurs enfants de belle  taille,  robustes  et  bien
formés, mais à demi noirs." 

Nota : pas d'autre  indication  de  date  que  l'année  de
naissance (1658) de Jacques Fontaine,  beau-frère  d'Aaron
et Guillot Boursiquot, lesquels ne figurent pas  dans  les
recensements du XVIIe siècle de la Martinique,  antérieurs
à leur date d'arrivée probable (1685/1690 ?).


Page suivante
Retour au sommaire




Révision 28/12/2004